Pourquoi les auteurs écrivent ?

Cet article m’aura été inspiré par un commentaire de NathotX sur un précédent article.  A ceux qui hésiteraient à écrire un livre ou commencer un blog, par peur de ne pas avoir assez d’inspiration pour continuer à longueur de semaine, je dirai donc volontiers de ne pas s’inquiéter : vivre est une source suffisante d’inspiration ! Bref, ce prélude passé, allons dans le vif du sujet :

« Pourquoi j’écris ?», une telle question pourrait paraître absurde à certains auteurs, car nombreux sont les écrivains qui, portés par un dramatisme lyrique, aiment à dire qu’ils ne pourraient pas vivre sans écrire. La vérité, c’est qu’écrire est loin d’être un besoin vital, et que quiconque écrit pour un ou plusieurs buts,  cachés ou non, plus ou moins avoués, parfois inconscients. Aujourd’hui prenons un peu de temps pour comprendre pourquoi un auteur peut se mettre à écrire, et surtout ce que cela implique pour lui…

Les raisons d’écrire ont beau être multiples, on retrouve généralement les mêmes parmi les auteurs. Écartons donc les écrivains loufoques -qui se seraient mis à la plume car ils aimaient juste son bruit sur le papier, ou au clavier car ils aimaient taper n’importe comment sur les touches- et tâchons d’établir une liste des principales « vraies » raisons qui poussent une personne à écrire :

  • Être lu : Un nouveau cliché à détruire dans cet article : personne n’écrit pour « être lu », même si beaucoup d’auteurs vous donneront cette raison. Non, personne n’a jamais écrit pour être lu, pour la simple et bonne raison ami auteur que, s’il m’arrivait de lire ton livre sans jamais que tu ne l’apprennes, sans que je ne te dise quoi que ce soit, tu ne serais pas du tout satisfait. Pourtant, tu aurais été lu. J’aimerai vraiment étudier un auteur de best-sellers qui serait au courant du succès de ses livres mais n’aurait jamais reçu aucun retour, ni des critiques, ni des lecteurs, ni même de son éditeur. Malheureusement, ce genre de lascar n’existe pas !
  • Prendre du plaisir : Déjà, on est plus raisonnable ! Ceux qui avouent franchement « ne pas pouvoir vivre sans écrire » -mis à part les artistes maudits- écrivent généralement pour le plaisir (tout du moins dans un premier temps). Il s’agit d’écrire car on aime cela. C’est une occupation saine et intelligente, qu’on soit doué ou non pour l’écriture. Le plaisir d’écrire devrait d’ailleurs logiquement être la motivation première de tout auteur.
  • S’exorciser : Nombre d’auteurs reconnaitront écrire pour « s’exorciser », libérer des sentiments qu’ils n’arrivent pas à expurger autrement, comme suggère de le faire cette ancestrale et peu prudente technique d’écrire une lettre d’injure à quelqu’un et de la détruire aussitôt pour soulager une colère d’un jour ! Encore une fois, il s’agit là d’une occupation saine, même si les écrits qui en résultent devraient rester à l’abri des regards pour qui est un tant soit peu pudique.
  • Apprendre à écrire : Cette raison, à peine copiée de la chanson de Florent Pagny, est tout aussi bonne qu’une autre : un auteur peut écrire dans le but de s’améliorer. C’est en forgeant qu’on devient forgeron (quel rapport avec l’écriture me direz-vous…) et rien de tel que de se jeter corps et âme dans un roman pour comprendre qu’on fait tout de travers !
  • Raconter des histoires : Les écrivains ne sont pas tous du genre à écrire sur eux ou pour eux, certains écrivent car ils aiment inventer et raconter des histoires. Cette fois-ci, la notion du lecteur entre doucement en jeu car qui raconte une histoire pense forcément à un lecteur, même si ce dernier n’est autre que lui-même !
  • Faire ressentir des émotions : Un peu au-delà de la simple histoire, un auteur pourra écrire dans le but de faire passer une émotion, un sentiment, dans le but de toucher ses lecteurs, de provoquer quelque chose en eux. Cette fois-ci, le lecteur est nettement plus pris en compte dans le processus d’écriture, et l’auteur espère clairement « être lu », et surtout avoir des retours !
  • Laisser une trace : Au-delà de simples contacts avec le lecteur, ou même d’échanges, un auteur peut également écrire pour laisser une trace. « Les paroles s’envolent… » comme dirait l’autre, l’auteur peut donc écrire pour laisser une trace, garder un souvenir, perpétuer sa mémoire ou celle d’un autre… Si le tout peut s’avérer un tant soit peu mégalo, n’oublions pas que le but premier de l’écriture est bien de garder trace des choses.
  • La célébrité : Le meilleur pour la fin, car j’apprécie cette raison plus que tout autre. L’auteur, poussé par ses rêves de gloire, peut écrire pour l’argent, la célébrité et la postérité. De Beauvoir, Champagne et musique classique (l’équivalent littéraire du « sex, Drug and Rock’n’roll ») auront fait tourner la tête de bon nombre d’auteurs en soif d’admiration. Je vous arrête : cette fois-ci, c’est clairement mégalo !

Nous y voilà : vous avez lu l’article jusqu’ici -ce qui prouve un certain intérêt pour le sujet, une détermination sans faille ou encore une absence totale d’autres choses à faire- et vous attendez donc à une brillante conclusion. Et bien préparez-vous à être frustré, car c’est à vous de tirer une conclusion sur tout cela ! Vous l’aurez compris, un auteur lambda a souvent une multitude de raisons d’écrire, et j’espère que cet article vous aura aidé à identifier les vôtres si ce n’était déjà fait. L’important est désormais de vous offrir les moyens de vos ambitions -et je vise ici particulièrement mes chers amis désireux de célébrité- et de vous assurer, pour votre propre bien-être, que ce sont de bonnes raisons à vos yeux !

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33 réflexions sur “Pourquoi les auteurs écrivent ?

  1. Voilà. Et il n’y a plus qu’à piocher dans cette bonne petite liste, pour se faire son propre assortiment de raisons. C’est bien réfléchi !
    C’est amusant parce qu’avec le temps qui passe, moi écrivaillon je n’arrive presque plus à me laisser porter par un roman (je l’étudie avec des yeux de diamantaire devant un caillou), tandis que j’aime de plus en plus lire des livres d’écrivains parlant de littérature et des différentes manières d’aborder la narration. Alors ce billet de Sediter : c’est du miel tout pur pour mapomme ! Est-ce que ça vous fait le même effet, camarades d’écriture ? Impression d’avoir suçoté un bon bonbon.

  2. Je vous lisais sans vraiment espérer que vous citiez la raison que je donne volontiers me concernant : « J’écris parce que je ne suis pas assez vif. »
    En entendant bien sûr le mot vif dans tous ses sens, rapide et vivant.
    L’impression, concernant les idées, leur dimension, leur vitalité, de ne pas atteindre pour moi-même et vis à vis de tout interlocuteur un niveau de relation et de vie (de tous les jours) suffisamment signifiant. Il n’y a pas 36 manières d’exister et de rendre justice à l’expérience d’exister. L’écriture, l’art, serait la moindre.

    Dans ma proposition, se cache alors une dimension chamanique, messianique, terroriste, révolutionnaire, au-delà des mots, qui n’a de sens et de réelle expression que dans les actes et dans le présent de toutes les questions.
    Alors vous pouvez penser qu’il s’agit d’une digression mégalomaniaque, ou bien faire le constat vous-même que l’écriture, et pire, la littérature, n’a de pouvoir que sur les choses qui dorment dans l’enceinte de son monde particulier et comprendre l’humilité avec laquelle j’essaie, malgré tout, de danser.

  3. je ne suis d’accord avec à peu près rien mais surtout ce qui me gène c’est que tu sembles porter un jugement sur les raisons qui poussent les autres à écrire.
    « déjà on est plus raisonnable » … ça pose problème à qui, que mes raisons soient futiles et superficielles ?
    après tout, chacun son écriture, chacun sa motivation, chacun son résultat, non ?

  4. @Berger N’exagérons pas ! Je vais rougir après ! 🙂 Merci beaucoup !

    @AMP En effet, je n’aurais jamais pensé à une telle raison. L’écriture m’a personnellement toujours permis d’approfondir des choses que la pensée est trop rapide pour considérer de manière parfaite, même si c’est sans doute une perte de temps !

    @MlleLouise Ton reproche est tout à fait justifié. Ce « on est plus raisonnable » venait surtout du fait que je n’aimais pas la raison « Je veux être lu », ensuite il est vrai que je suis plutôt critique. A vrai dire, je ne juge pas du tout les raisons en elle-même, mais plutôt certains archétypes d’auteurs qui écrivent pour telle ou telle raison.

    Je suis sûr qu’un auteur peut écrire pour la célébrité de manière justifiée et avec raison, pourtant la plupart des auteurs que je croise qui visent la célébrité -avec souvent toute l’arrogance que cela implique- ne valent pas un clou et ne chercheraient jamais à se remettre en question, rejetant toute critique en bloc. Voilà ceux que, très franchement, je me permets de juger de manière négative…

    Merci pour vos commentaires les auteurs ! 😉

    • Écriture et célébrité : c’est vrai qu’en commençant Cossmicomedia, dont je sentais toute la puissance virtuelle, je me suis dit : « et si j’écrivais là un best-seller ? J’en ai les moyens je le sais ! »Et puis, le livre et son histoire m’ont donné des ordres, et c’est devenu tout autre chose qu’un ***tadamm, Best-Seller***. La littérature m’a mis le grappin dessus, et je me suis retrouvé à écrire pour ne pas devenir dingo. Adieu le yacht à quintuple pont, re-bonjour les semelles trouées !

      • De toutes manières, les grands auteurs dont nous parlons aujourd’hui sont loin d’avoir tous été riches et célèbres ! Les vrai célébrités le sont à titre posthume, c’est nettement plus classe !
        Et puis les semelles trouées ne sont pas si désagréables…

      • Ehmmm… bon, on digresse peu à peu, là, mais si la richesse venait avec le talent, ce serait une grande première mondiale et historique. Moi je n’aurais rien contre, évidemment, puisque je suis un gros vaniteux. Les semelles trouées, ça laisse passer l’eau. Et la couronne que le temps dépose aux pieds de l’artiste est peut-être en or, mais comme l’artiste est mort, cet or ne lui sert de rien.

        – Ah, Seigneur si tu m’écoutes ! Un seul petit jour sans avoir le souci du lendemain !!!
        – Eh, Don camillo, pour le beurre et l’argent du beurre, il fallait faire ministre ! Click.

        Et le Petit Jésus raccrocha, outré de ces prétentions impertinentes. Non mais.

        Moralité, je n’écris pas pour de l’argent. Mais alors pourquoi, bon sang, pourquoi ?
        Réponse perso : pour vivre intensément. Un peu comme AMP, si je ne m’abuse ?

        Allez, un petit lien sur le sujet !
        http://www.ecouterlirepenser.com/textes/aeb_id_ecrire.htm
        Et d’ailleurs, tiens, je le dépoussière un peu et hop, sur Twitter, pour nourrir l’électrogoinfre.

  5. Connaissez-vous Maurice Nadeau ? Rappel : grand critique littéraire, découvreur de talents et éditeur chez Denoël, Julliard, Mercure de France… à la question qu’est-ce qu’un écrivain, il répond : »Ecrivain ? ça voudrait dire avoir un but précis, une vocation, un besoin d’écrire et de se montrer. Il y a beaucoup de narcissisme las-dedans. Le besoin de trouver sa place dans le monde, d’imprimer sa marque quelque part. Le refus de la mort aussi. »
    Je crois que le refus de la mort est une motivation importante dans l’acte d’écrire. Je crois qu’Hemingway et Fitzgerald en ont parlé; Ce détail manque à votre article.

    • Non, je ne connaissais pas Maurice Nadeau ni ses mots. En effet, la postérité peut être un objectif, surtout lorsqu’on réalise que les plus grands auteurs sont toujours connus des siècles après leur mort. C’est ici un mélange de « laisser une trace » et de « célébrité ».

      Merci pour vos précisions et votre commentaire !

    • Il faut être fou ou abuser de subterfuges pour croire sincèrement gagner quelque chose sur la mort en grattant du papier. Sinon romantique. Et je ne comprends pas ce que vient faire là-dedans le narcissisme dès qu’on concède qu’il y a un « besoin de trouver sa place ». 😉

      • Il y a des mécanismes inconscients qui animent nos actes. Je crois qu’écrire, ce n’est pas seulement écrire des histoires, c’est un acte fort. Le narcissisme nous en avons tous besoin, nous sommes tous narcissiques de manière plus ou moins prononcée, vous comme moi. Et il n’est pas question de gratter du papier pour gagner sur la mort, c’est aussi une manière de se rassurer, de trouver un compromis avec ses propres angoisses. ((:

  6. Assez bien vu ce que tu as écris et finement hiérarchisé.

    Le plus important, pas forcément le plus excitant, reste à mes yeux la fonction résiliente de l’écriture. Écrire permet de marcher de guingois et de s’en accommoder, sinon de jouer avec les déséquilibres fondamentaux qui sont à l’origine d’une vocation d’écrivain.
    Après, ou en même temps, viennent le plaisir donné par ce fantastique lego désirant, et la possibilité d’être aimé au moins par un lecteur, et plus si affinités.

  7. Je pense que la raison de AMP pourrait se décliner en « je suis bien plus à l’aise avec l’écrit »
    Mes pensées partent rapidement dans tous les sens quand je les pose, elles partent tout aussi vite dans tous les sens (faut me voir écrire un billet de blog… j’en ressors avec au moins 3 brouillons de billets sans un seul fini…), mais au moins j’ai la trace de ce que j’ai pensé.

    Reste que je ne suis pas à l’aise à l’oral, la timidité aidant, je préfère me taire plutôt que de paraître idiote ou de sortir une phrase mal interprétée (ou mal formulée !).
    Le fait est que quand on écrit, on fait face à une feuille, un écran et pas à l’interlocuteur direct. Même en cas de dialogue direct, et pour des timides (au sens « réelle peur de l’inconnu » pas la timidité gentillette qu’on croise chez tout le monde ou presque), c’est un moyen d’exister et d’aborder des sujets, de lancer des débats, de répondre à des questions en public tout en étant « à l’abri ». C’est un moyen de s’exposer sans avoir à affronter, en plus des autres, sa propre réaction de timidité (c’est extrêmement handicapant !)

    (Pardon si je répète ce que tu as dit ou ce que quelqu’un d’autre à dit, car en plus d’être timide, j’ai le défaut d’être cyclo et en ce moment, j’ai un mal fou à me concentrer sur quoi que ce soit, même une simple phrase… j’ai lu le billet y’a quelques jours et je réponds d’après souvenir et j’ai lu les commentaires en travers – oui ben j’ai pas de Fleur de Bach-Marronnier blanc sous la main alors on me critique pas merci, c’est très chiant pour moi 😛 )

    (Et juste pour dire sur la photo que cette personne ne sait pas tenir une plume ! Où est sa main ? Tenir du bout des doigts c’est pas bon pour l’assurance du trait et puis la plus est trop droite par rapport au tracé ! -ceci était la remarque de la calligraphe qui sommeille en moi depuis trop longtemps et qui chipote facilement sur les photos « posées »)

  8. Ce qui m’étonne finalement – et notre petite discussion ici en est un exemple – c’est la catégorie des petits « moteurs » auxquels on considère habituellement qu’un écrivain doit nécessairement avoir recours pour nourrir son activité, et continuer à produire qui il faudrait qu’il soit. Motivations sociales et/ou psychologique qui font figures de leurres et de prétextes. Comme si l’écriture n’allait jamais nulle part et n’était qu’un jeu entre soi et les autres, et le monde. Tous à égalité dans le silence général.

    Qui croira qu’on peut avoir pensé son expérience au monde au point d’avoir un message à porter ? Pourquoi ne prêtez-vous pas à l’artiste une vision révolutionnaire telle qu’il n’a plus d’autre choix qu’essayer de lui frayer un chemin vers son possible déploiement ? Au final, le bénéfice d’une œuvre qui avance en dépit de toutes les interprétations rabâcheuses et accessoires dont ceux qui n’ont pas l’imagination qu’il faudrait pour la comprendre la parent. Que faites-vous de la démarche exactement intellectuelle ? Et quand je dis « intellectuelle » je veux dire plus, bien entendu, c’est la somme lucide de l’expérience d’être vivant ici dans ce monde là. Position réfléchie face au langage et à l’immense problème de la communication.
    Vous acceptez que tous les jours des scientifiques et des ingénieurs changent votre monde, quelles miettes d’intelligence et d’avenir laissez-vous à l’écrivain et au poète ?

    Hélène Bessette écrit « Un écrivain est celui qui, par son intelligence, domine le Monde qui l’entoure ». Je pense qu’il y a ce qu’il faut dans cette définition pour susciter tout le désir de communication, fondamentalement notre sujet de discussion.

    J’ai parlé de message. Aujourd’hui, le mot « message » fait sourire. On pense avoir enterré depuis longtemps la dernière surprise que l’écriture pourrait vraiment nous réserver. Et puis, peu de gens comprennent la dimension intellectuelle des démarches artistiques qui se sont produites durant leur siècle et les siècles précédents. Entre deux tremblements de terre – pour ceux qui les ressentent -, on s’accommode d’un paysage mort, on discute de phénomènes triviaux entre amis, presque certains de savoir ce qu’est un écrivain, et donc de pouvoir discuter des ambitions qui mènent à cette qualité. Pas surprenant, beaucoup de bons écrivains se prennent eux-mêmes pour des écrivains et c’est tout.
    Au fond, le mannequin dans sa vitrine, n’a pas à réfléchir plus loin, ni plus profondément, que ce qu’il offre à voir.

    Si l’idée de message – et sa réalité qui est la démolition intellectuelle d’un sommeil – ressemble à une naïveté ou à une vanité c’est parce qu’elle est trop ambitieuse pour la plupart des écrivains eux-mêmes qui peinent à réveiller et animer toutes les conséquences des conceptions qui sortent de leur chapeau magique.
    Il n’empêche, le message c’est peut-être justement d’éclairer, par la puissance d’une écriture, les raisons qui œuvrent à cette situation qu’un message tel qu’aujourd’hui on l’attend n’est pas possible. Pas si naïf en définitive.

    Parce que rien ni personne n’est « au monde » en n’étant que ce qu’il est, les écrivains ne sont pas des écrivains, la littérature n’est pas la littérature, vous devriez vous convaincre qu’il y a des choses qui se passent mais qui ne se produisent pas dans les termes et n’aspirent pas à l’existence que cette discussion sur l’écrivain et ses motivations suggère.

    Pour moi un écrivain (je n’aime pas ce nom) est quelqu’un de placé – souvent malgré lui – au cœur de la problématique géante et faramineuse du langage et du Sens infirme, dérisoire, abruti, défiguré que ce langage prétend pourtant véhiculer honnêtement – d’où l’état du monde. Son problème est intellectuel. Il est là où achoppe l’espace mythique de la communication. Pour être là et grandir là il faut avoir une vision.

    Je suis sans doute en train de rédiger une réponse un peu luxueuse à cette discussion sympathique qui ne réclamait pas une telle tartine mais j’avais envie d’en profiter pour rassembler quelques idées et me frotter à cette question souvent posée. Pourquoi écrit-on ? Bon qu’à ça ! disait Beckett.

    • HOUI !!! Bon, si tu le veux bien, AMP, je copiecolle cette contribution pour la refiler à ruminer à deux-trois camarades, voir ce qu’il en sort. Peut-être même voudront-ils ensuite faire un tour par ici.

  9. Pingback: » Dormir atroce

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  11. L’écriture relève aussi de la folie de penser que nos écrits pourraient intéresser ne serait-ce qu’une personne. Y a t’il un seul écrivain sain d’esprit? Je ne pense pas. Mais c’est cette quête perpétuelle de l’écho en l’autre qui nous donne de telles envolées lyriques.

  12. C’est très bien élaboré la réponse à cette question posée. Toutefois que devons nous entendre par cette citation d’une écrivain qui soutient que :«Quand j’écris,jecris»???

  13. c’est drôle ! Je débarque après la bataille vu que cet article date, mais ça m’a fait bien rire quand même. En fait, le 5 juin je prépare une soirée lecture exactement sur ce thème. Dommage, si j’avais lu cet article avant je t’aurai demandé la permission de le citer. Après… J’avoue… Je ne suis pas tout-à-fait d’accord avec toi sur le fait que personne n’écris pour être lu… Ce n’est que mon avis. Mais c’est très drôle tout de même.

    • Effectivement, cet article date un peu. Ça ne me rajeunit pas tout ça ! Je ne dis pas forcément que personne n’écrit pour être lu (enfin si, mais je nuance un peu). Mon propos est plutôt de noter qu’être lu n’est pas une finalité suffisante pour un auteur, qu’il en ait pris conscience ou non.

      Imaginons que tu mettes en ligne l’un de tes romans sur un site internet, et que la seule information disponible pour toi est le nombre de lectures. Tu connais de manière précise le nombre d’internautes ayant visité la page sur laquelle se trouve ton roman. Même si le chiffre atteint 1 million, tu ne seras jamais satisfait car tu n’auras pas reçu un seul avis, une seule critique, une seule appréciation sur ton roman.

      C’est en cela qu’être lu n’est pas une finalité.

      • Bonjour, je lis votre commentaire avec beaucoup de retard mais! Tout simplement je dis merci car vous enrichissez encore ma réflexion par rapport à ce thème. Merci !

  14. Je ne vois pas les choses pareille pour moi ce serai un moyen de vivre dignement (pas de chercher la fortune) et aussi de libéré mon trop plein d’imagination et de créativité.

    • L’article date un peu, donc il m’a fallu me relire pour répondre à ce commentaire !

      En toute honnêteté, « écrire pour vivre » est une raison qui ne me serait pas venue à l’époque… et qui ne me vient toujours pas à l’esprit.

      J’ai du mal à considérer l’écriture de fiction comme une manière de vivre dignement (et pourtant je « vis de ma plume » en tant que rédacteur web).

      Après c’est peut être parce que je n’y ai jamais mis les formes, mais je trouve que parvenir à retirer ne serait-ce qu’un SMIC mensuel avec la vente de romans est proche de l’inimaginable.

      Et quand bien même je sais que c’est possible, je sais aussi que cela impliquerait d’écrire des romans de manière très régulière et de se forcer à écrire un certain type de romans (de manière à capitaliser sur la fidélité des lecteurs et à répondre à leurs attentes).

      L’un dans l’autre, je ne résumerai donc pas vraiment cela à « vivre dignement »… Mais je suis probablement à côté de la plaque ! 🙂

      • Oui de ce point de vu il est assez difficile je vivre de l’écriture mais avec un métier à côté on peut allié passion d’écrire et vie correcte (un revenu supplémentaire n’est jamais de trop pour finir le mois), enfaite je parlait plutôt des auteurs qui gagne des centaines de millier d’euros grâce à leurs livres, moi ça me fait pas tourné la tête (voilà exactement ce que je voulait dire).

        Merci d’avoir pris le temps de répondre.

  15. vouloir écrire, c’est une chose qui occupe mon esprit, j’arrive pas à faire le pas pour remplir assez de pages, racontant mon histoire ou bien on inventant d’autres. ce qui me plait d’écrire déjà ces quelques mots avec vous,je remplis un chapitre, waw!!

  16. Mais moi je veux commencer maintenant. Pourquoi j’écris ? J’écris parce-que je veux partager mes idées, je veux partager la réalité des faits que je vis. Je veux écrire parce que je veux écrire pour pouvoir laisser mes traces…Merci j’attends vos conseils. Merci.

    • Bonjour, Malheureusement, n’espérez pas écrire avec des idées que vous auriez eu avant d’écrire. Tout change. Il vous faudra vous trouver d’autres raisons en vous y frottant. C’est l’écriture qui conduit la pensée. Si j’ai raison et si vous êtes attentive vous la verrez éclore peu à peu, et vous vous en étonnerez. Pourquoi écrit-on, mais aussi de quoi se sert-on pour écrire ?

  17. Bonjour,
    Bon, je sais que si je me mets à vouloir encore une fois laisser un commentaire à cet article l’opération va me prendre une bonne paire d’heures. ; )
    J’avais oublié que je m’étais inscrit à ce flux et les récents signes de vie reçus dans ma boîte mail ne pouvaient que me titiller. C’est très bien ! Donc, titillé, voici ce que j’ai encore envie de dire sur le sujet.

    Longtemps j’ai cru que soigner et augmenter la conscience que j’avais de cette activité, écrire, ne pouvait m’amener qu’à mieux écrire. Bien souvent, empêchés pour des raisons familiales, professionnelles, sociales, et trop liés à des circonstances de notre vie pour nous y adonner pleinement, nous n’avons d’elle, de cette activité, que cette rêverie encore vivace, comme le feu qui couve. Il y a forcément une histoire philosophique, métaphysique, psychologique, qui s’élabore ainsi. C’est d’ailleurs souvent comme cela que l’on se pose ce genre de questions sur la nature de cette activité car « dans l’action » et lorsque que nous sommes comme donnés à l’écriture, ces considérations presque n’existent plus, elles œuvrent, elles ne sont plus un problème. On n’y pense plus, on les incarne.

    Et puis il y a le sens de tout cela qui doit exister, il existe. Pourquoi écrire ? Qu’en attendre ? Après quoi courir ? Il y a-t-il quelque part un état « vrai », un état satisfaisant qui vaille la peine qu’on le recherche ? Qui espère-t-on être ou devenir ?
    J’avais probablement raison de penser que mieux comprendre cette quête, surtout en l’établissant par rapport à ce qu’elle ne peut pas être, me ferait mieux écrire.
    Sauf que depuis je me suis aperçu que de toutes ces bonnes raisons que l’on se trouve, de ces ajustements spirituels dont on se sent augmenté, on ne fait rien, rien en tout cas de véritablement conséquent pour le déroulement toujours un peu caché de cette entreprise qui demeure un mystère. Au contraire, à vouloir en devenir conscient on s’empêtre.

    Je rejoins à présent davantage l’hypothèse « pour le plaisir » énoncée dans cet article. Mais il s’agit d’un plaisir significatif et construit, car ce plaisir s’invente et se renouvelle en chemin à mesure que l’on en apprend plus sur le paysage où il prend sa source, il est le plaisir qui déborde. Donc c’est chaque fois un plaisir nouveau, changé, grandi. C’est ainsi que joue son rôle le supplément de conscience que nous acquérons, elle par-dessus et sa vérité par-dessous. C’est une dialectique de la poursuite.
    Il y a à chaque fois un défi supplémentaire à relever pour accéder, encore une fois ou constamment, à ce plaisir qui se situe toujours à la limite de ce que nous savons et de ce que nous ignorons. Comment, en en sachant autant, puis-je éprouver le même besoin de m’exprimer qu’à l’origine ? Parce que tout a changé, parce que j’ai changé.

    En analysant mon rapport à l’écriture, j’ai découvert le royaume des mythes. L’écriture et moi-même. Mon langage, mon désir et mon espoir de communication. Ce que l’on peut espérer dire. Tout est mythes, et uniquement cela. Sans mythes aucun mouvement n’est plus possible. La joie, le désespoir, tout ce qui m’anime provient de la nature mythique de la représentation du monde et des moyens d’en aborder le problème. Le langage n’est que cela. En même temps il est beaucoup puisque le monde n’est lui-même que cela.
    Comment l’exprimer ?

    C’est alors que réapparait le plaisir, c’est-à-dire au travail quand on accepte que tout puisse fuir. J’ai peut-être longtemps eu peur de perdre ce que je me suis imaginé avoir compris, tout mon savoir, ce qu’il y avait de plus lucide dans ma démarche. En réalité non si je suis là où mon plaisir se renouvelle, là où il renaît, en dehors ou à côté de ce que je pensais avoir à dire ou montrer. A l’encontre de toutes nos conceptions pensées et réfléchies, même et surtout s’il s’agit de pensées de chair, c’est-à-dire d’œuvres de vie, fruits de patience et d’illuminations, ce qui s’exprime véritablement n’apparait que là où nous sommes à bout de mots, comme à bout de souffle. Le plaisir, lui, trouve comment.

    J’imagine qu’en toute circonstance ou face à tout problème rencontré pour avancer en écriture le plaisir pourra être votre guide. Même si vous n’avez rien à dire. : ) Ne vous faites pas niquer par les idées (oui vous l’avez compris). Vous en savez plus qu’elles.
    Vous qui avez déjà rencontré ce plaisir, si vous l’avez en berne c’est que probablement vous vous imaginez avoir besoin de plus, vous vous chargez de rêves qui vous encombrent inutilement.

    C’est ainsi, par le plaisir, que cet acte vraiment très proche de vous-même vous informe où vous en êtes de votre rapport au monde, qui ne peut pas s’établir dans une lutte, un piège, ou une forme quelconque d’avidité. Vous le sentez quand il vous veut du bien. C’est en cela que vous ne pouvez rien retirer d’autre de cet acte, il n’y a rien à en obtenir (du verbe avoir ou posséder). Vous ne vous changerez pas mieux ailleurs. Vous ne vous exprimerez pas comme vous l’espérez et l’on ne vous comprendra pas comme rêvé, qu’importe, vous chanterez ce que vous en pourrez, selon la seule musique que vous en entendez, et c’est déjà pas mal.

    • Wow ! 🙂 Comme quoi le simple sujet d’écrire peut entraîner des heures et des heures d’écriture !

      J’en retiens que l’écriture se vaut à elle-même, et que chercher à mieux la comprendre ou à trop analyser nos motivations aura tendance à nous retarder plus qu’autre chose. J’en retiens aussi que l’une des difficultés de l’écriture est sa lenteur, le temps nécessaire pour boucler un projet, pour le terminer.

      Loin de moi l’idée de rabaisser les autres arts, tout aussi exigeants, mais l’écriture d’un bouquin a le défaut de ne pas nous permettre de juger l’œuvre finale en cours de route. Alors qu’un croquis ou qu’un dessin laissent percevoir la beauté du tableau qui en découlera, les pages qui s’accumulent ne font que rendre le livre plus fouillis, plus difficile à juger dans son entièreté.

      Résultat : l’auteur a plus de temps pour douter de son propre projet, mais aussi de ses motivations, du temps qu’il passe à rédiger quelque chose qui est peut être, probablement, très mauvais. Et n’est-ce pas notre capacité à cogiter, pourtant à l’origine de notre envie d’écrire, qui finit par nous tirer par le bas ?

      Merci encore pour ce commentaire très riche et personnel, qui offre un bel éclairage sur le sujet.

      • Je ne dirais pas que l’écriture vaut pour elle-même. Ce serait la vouer à trop d’abstraction alors que c’est par la réaffirmation continuelle de son concret profond qu’elle délivre la plus troublante part de son sens. Il y a des êtres humains qui se parlent et ils ont besoin de s’entendre.
        Il s’agit d’un objet, le langage, qu’explore celui ou celle qui s’avance sur le chemin de l’écrit.

        L’écriture s’inquiète beaucoup d’elle-même. Vous écrivez et vous vous apercevez que vous tissez des justifications structurelles au cœur de votre texte. Même quand vous y déployez des pensées, elles semblent autant exister pour ce qu’elles ont besoin d’exprimer que délimitées par ce que le texte leur permet d’être. Merleau-Ponty disait assister à l’apparition de sa pensée. Où réside votre idée première, celle qui vous a originairement motivé ? Vous observez quelque chose se produire, auquel vous n’aviez pas pensé, c’est, je le crois, quelque chose d’extrêmement important.
        Étant son premier problème quant à la valeur de la connaissance qu’elle acquiert sur ce monde, l’écriture ne peut pas ne pas chercher sa propre équation, dont peut-être tout dépend.

        Son concret, je le défini comme la somme de ce que nous partageons. Il n’y a pas plus concret ici que le langage qui est notre chose commune, davantage que toute histoire personnelle, individuelle, inventée ou non, dont nous pourrions rêver, naïvement un peu, réussir à « partager ». C’est pourquoi je pense, et cela finit par dessiner en creux une esthétique, qu’en apprendre tant que nous le pouvons sur le langage, en savoir le plus possible, nous rapproche de nous-mêmes et des autres. Mais, en apprendre, avancer, se rapprocher, dans ce domaine n’est pas comme se déplacer, c’est changer, se transformer, s’abandonner. Le concret nous le retrouvons dans les conséquences de cette entreprise. Je ne dis pas comment donner corps et vie à cette « science », je pense que le plaisir ressenti à l’écriture nous y aide.

        Vous parlez de peinture. Voyez par analogie comment le plaisir volé à écrire, comme bénéfice indubitable et immédiat, peut produire valablement une œuvre. J’envie souvent le peintre. Je l’observe qui peut espérer une satisfaction à court terme, poème après poème. Je compare la peinture à la poésie (écrite) car dans la durée et la finalité c’est la même chose. Je l’envie d’obtenir un résultat la plupart du temps en quelques heures. Sans minimiser sa difficulté, quand les affres et les doutes de la première phase sont passés et lorsque le peintre est « lancé » et son esprit « démarré », il est capable d’aligner les poèmes. C’est comme cueillir les fruits sans besoin d’en produire l’arbre resté caché.
        A l’écrit aussi, il y a certainement un arbre invisible.

        Il ne vient pas au peintre l’idée d’élucider positivement son état d’esprit et ses raisons, d’ailleurs, psychologiquement, il exproprie des formes et des couleurs. Une fois la chose peinte il l’oublie et n’y pense plus, « il fallait que ça sorte ». Physiquement c’est créer des objets, comme des présences, qui ne l’ont que traversé.
        L’écrivain, lui, est tenté de tout expliquer et de tout apporter sur les planches. Pourtant il ne le peut pas plus que le peintre. Rien, aucune nécessité matérielle, aucune contrainte de création, ne lui explique quelle part est exprimable et quelle part ne l’est pas. S’il le veut, il peut rêver indéfiniment d’une indifférenciation totale et tous les propos, tous les mots, se valent. L’abstraction, peut-être, y trouve son compte. Aucune couleur jetée sur un support n’emportera avec elle son idée.
        Cependant, il y a quelque chose qui semble aussi savoir où et comment cueillir ce genre de fruits.

        Je suis désolé, c’est difficile de rester clair sur ces sujets. : )

  18. Ben moi je suis pas d’accord avec vous. Le but premier d’un écrivain, c’est d’écrire pour entrer en communication avec les autres (et son autre) ou, pour faire plus simple, pour être lu (ne serait-ce déjà que par lui-même). C’est pas compliqué, pas la peine de lui chercher des poux : celui qui écrit et qui planque ses rédactions au fond d’un tiroir, c’est qu’il est trop complexé pour les faire lire (ou pour se relire), c’est tout, sinon il écrirait dans sa tête, pas besoin de coucher tout ça sur le papier. Avouez, si vous écrivez tous là et que vous publiez des bouquins, des billets ou que simplement vous y répondez, c’est bien pour être lus (et vous relire), nan ? Ou alors c’est que j’ai rien compris…

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